Weber : Quels étaient les grandes lignes définissant le projet ?
Morgan Guillot : Le Symat, MOA, voulait constituer un pôle déchetterie +recyclerie. Avec une déchetterie innovante recourant à une méthode d’exploitation plus sécurisante pour les usagers. En fonctionnant à plat, au moyen de caissons de sécurité. Et adossée à cette entité, la partie recyclerie pour trier en amont ce qui peut être réemployé.
Il n’y avait pas d’exigence particulière sur l’écriture architecturale si ce n’est une volonté de communication.
Weber : Comment l’objectif recyclerie/déchetterie a fait émerger le besoin d’une nouvelle typologie ?
MG : Pour répondre à l’appel d’offre, nous avons proposé des solutions matériaux, mais uniquement dans un objectif de visuel, de communication comme en bardage par exemple, avec une grande importance accordée à la signalétique, au travail de l’image. Notre approche nous a permis d’être retenu par la MOA.
À ce stade, j’ai précisé le projet sur l’aspect environnemental pour faire une architecture qui se voulait intemporelle avec la création d’une nouvelle typologie d’équipement
En quelques mots : on sait ce qu’est un équipement public, on sait faire la différence instinctivement entre une école, un gymnase, une halle de marché. Ici, nous sommes sur de nouveaux modes de consommation par le réemploi, par cette revalorisation du déchet, qui devient ressource.
Dans ce projet, nous sommes dans les codes inverses des supermarchés. Le supermarché est une boite fermée, on reste à l’intérieur où il y a énormément d’objets sur lesquels nous nous focalisons. On ne se rend pas compte du temps qui passe, des différences de températures, de la nuit à 18 h en hiver…tout est artificialisé pour se concentrer sur le produit.
Ici, le code inverse ce traduit par un repositionnement du déchet, qui est l’objet, comme ressource, dans un contexte environnemental qui est la vie, et le temps qui passe, les saisons et le climat. Le magasin de vente devient alors un lieu de sensibilisation jusqu’à traiter de la question environnementale que nous abordons via la mise en place d’un bassin d’infiltration des eaux, qui permet d’amener de la biodiversité, d’amener des insectes. Et cette biodiversité-là peut être prétexte à la création d’ateliers pédagogiques pour expliquer la vie encore une fois.
Weber : Quels sont les différents espaces constituant la recyclerie ?
MG : La programmation était bien établie. Étaient définies :
- La déchetterie avec bureau d’accueil et vestiaire attenant, complété par l’espace extérieur de collecte des déchets et les locaux de déchets spéciaux.
- La partie recyclerie était prévue avec un magasin, un atelier pour réparer, une aire de lavage pour nettoyer et une zone de dépôt permettant à réception des objets de faire un pré-tri “à la sortie du coffre”. Avant que ces objets-là passent en atelier, il y avait une zone de stockage. Le personnel de la recyclerie disposant d’une salle de repos, de sanitaires publics et de vestiaires.
Ces 2 structures constituant 2 entités avec 2 gestionnaires différents : la déchetterie est limitée au public qui dispose du badge d’accès, donc un public assez local, la recyclerie étant un équipement public ouvert à tous. On est bien sur 2 ERP où tout est dissocié, même si on a une continuité de bâti.
À cette programmation initiale, nous avons apporté ces notions de
- Fonctionnement contradictoire par rapport au fonctionnement d’un supermarché
- Construction avec des matériaux environnementaux
- Paysage nourricier. Paysage aussi bien extérieur qu’intérieur avec ici la création d’un patio ouvert sur l’espace un jardin de 75 m² au milieu des 500 m² du magasin. Au-dessus de ce jardin, une grande verrière apporte beaucoup de lumière à la fois aux plantations et aux 2 zones de part et d’autre du jardin et qui sont dédiées à l’espace ateliers.
Nous avons apporté également une vision élargie du réemploi en suggérant la possibilité d’emprunter. Ce qui prolonge encore davantage la durée de vie du matériel qui sera de fait entretenu, repoussant le moment de l’obsolescence. Pour compenser la perte de revenue en découlant, pour l’association qui gère la recyclerie, nous créons un café afin que les gens puissent s’y arrêter et que cela devienne un lieu de vie à s’approprier en lien avec la volonté de faire des ateliers pédagogiques. On pourra venir avec les enfants par exemple, et les parents pourront se poser, bouquiner parce qu’il y aura également des livres à disposition, Nous avons amené cet espace-là vers la notion de tiers lieux.